Les règles contraignantes en matière de baux d’habitation incitent de nombreux propriétaires à opter pour d’autres modes de location de leurs biens, par le biais des plateformes Internet de location de courte durée.

Les baux classiques, soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989, présentent plusieurs inconvénients pour les propriétaires confrontés notamment au plafonnement de loyers, aux risques d’impayés locatifs, aux délais de procédure d’expulsion extrêmement longs, etc…

La location de courte durée via des plateformes Internet (Airbnb, Abritel, HomeAway, Wimdu, Booking…) apparaît comme une réponse pour certains propriétaires. Même si ce mode de location semble avantageux de prime abord en raison de sa souplesse, il reste soumis à une réglementation stricte.

Il est donc essentiel pour les propriétaires de se conformer aux dispositions légales ainsi qu’au règlement de copropriété, les risques de sanctions pouvant, en matière de location de courte durée, atteindre jusqu’à 50 000 € d’amende, le paiement d’une astreinte et une compensation.

Par ailleurs, une attention toute particulière doit être portée à la réglementation spécifique applicable aux logements proposés dans les communes de plus de 200 000 habitants et la région parisienne.

Les contraintes légales de mise en location de courte durée : du point de vue du propriétaire 

Meublé de tourisme courte durée

Le principe : Interdiction de la location commerciale d’un bien à usage d’habitation

Le cadre légal de la location à courte durée est déterminé par l’usage auquel le bien immeuble est destiné. Le Code de la construction et de l’habitation distingue deux régimes principaux d’usage du bien à louer : celui d’habitation ou un usage commercial.

La location touristique de courte durée est en principe assimilée à une activité commerciale ; elle est donc incompatible avec l’usage d’habitation.

Conformément à l’article L.631-7 du Code de la construction et de l’habitation : Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage (…). 

En principe, un immeuble affecté à un usage d’habitation ne peut donc pas être loué à courte durée sans que le propriétaire ne procède préalablement au changement d’usage de son bien.

Le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est également soumis à une autorisation préalable de mise en location octroyée par la mairie pour les communes :

  • De plus de 200 000 habitants, notamment : Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, Nantes, Montpellier, Strasbourg, Bordeaux, Lille et Rennes.
  • Des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. 

Par conséquent, le propriétaire souhaitant mettre en location de courte durée son local affecté à un usage d’habitation doit nécessairement procéder à un changement d’usage et, pour les communes susmentionnées, demander au préalable une autorisation auprès de la mairie.

À défaut de changement d’usage, le propriétaire s’expose à plusieurs sanctions : une amende civile d’un montant maximal de 50 000 € pour le défaut de changement d’usage et une astreinte d’un montant maximal de 1000 € par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé, et ce, jusqu’à la régularisation de la location (Article L.651-2 du Code de la construction et de l’habitation).

De plus, le défaut d’autorisation préalable est passible d’une amende de 5000 €. (Article L.324-1-1 du Code du tourisme)

À l’inverse, un local affecté à un usage commercial peut être mis en location de courte durée sur des plateformes de location telles qu’Airbnb, Abritel ou HomeAway sans demande de changement d’usage. Pour les meublés touristiques, une déclaration préalable auprès de la mairie doit tout de même être effectuée afin d’obtenir un numéro d’enregistrement à renseigner sur les annonces de location.

Il appartient au propriétaire de prouver le caractère commercial du bien par tout mode de preuve, comme le règlement de propriété, le permis de construire, l’acte de vente ou tout autre justificatif provenant de la mairie ou de la Chambre des Notaires, par exemple.

Le local est réputé à usage d’habitation s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. (Article L.631-7 du Code de la construction et de l’habitation)

L’exception : Location des résidences principales pour une durée inférieure à 4 mois par an

  • Location pour une durée inférieure à 4 mois par an

Conformément à l’article L.324-1-1 du Code du tourisme, par dérogation à l’interdiction de location de courte durée d’un bien destiné à l’habitation, la résidence principale du propriétaire peut être louée, mais sans excéder une durée totale de 4 mois (120 jours) par an.

La résidence principale est définie comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation. (Article 2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989)

Depuis le 1er janvier 2019, la plateforme Airbnb plafonne de façon automatique la location des meublés déclarés comme résidence principale. Ce plafonnement limite la durée totale de location à 120 jours imposant, de fait, aux propriétaires de respecter cette restriction.  

Les propriétaires doivent rester vigilants, car dans certaines communes le conseil municipal peut décider de soumettre les locations des meublés touristiques à une procédure de déclaration préalable auprès de la commune, nonobstant leur durée totale inférieure à 4 mois par an. (Articles L.631-7 du Code de la construction et de l’habitation et L.324-1-1 du Code du tourisme)

Les communes concernées sont :

  • Celles de plus de 200 000 habitants, notamment : Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, Nantes, Montpellier, Strasbourg, Bordeaux, Lille et Rennes. 
  • Celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.

Ainsi, le propriétaire souhaitant mettre sa résidence principale en location de courte durée doit obtenir un numéro d’enregistrement auprès de la mairie, qui sera obligatoirement renseigné dans l’annonce publiée sur des plateformes de location. 

La violation de l’obligation d’enregistrement est punie d’une amende civile de 5000 €. (Article L324-1-1 du Code du tourisme)

  • La location pour une durée supérieure à 4 mois par an

En cas de manquement à l’interdiction de louer sa résidence principale plus de 4 mois par an, le propriétaire risque des sanctions sévères.

Si le local loué constitue la résidence principale du propriétaire, en cas de dépassement du seuil de 4 mois par an, ce dernier s’expose à une amende civile d’un montant de 10 000 € (Article L.324-1-1 du Code du tourisme).

A cette amende, s’ajoute celle de 50 000 € et une astreinte de 1000 € par jour et par mètre carré utile du local pour défaut de changement d’usage (Article L.651-2 du Code de la construction et de l’habitation). 

Pour être autorisé à louer son bien pour une durée excédant la limite de 4 mois par an, le propriétaire devra nécessairement procéder au changement d’usage de son logement pour le transformer en un local à usage commercial afin d’exercer son activité commerciale de location touristique. 

Dans les communes de plus de 200 000 habitants et la région parisienne, la délivrance d’autorisation de changement d’usage est subordonnée à une proposition de compensation. Le propriétaire devra compenser le bien d’habitation dont l’usage a été modifié, en convertissant un local commercial équivalent en logement d’habitation classique. (Article L.631-7-1 du Code de la construction et de l’habitation)

Pour la Ville de Paris, une compensation de 2m2 doit être apportée pour 1m2 de logement d’habitation affecté à la commercialité. Le prix d’achat d’un titre de compensation varie en fonction du lieu de situation du local. La moyenne est de 1 600 € par m2 jusqu’à 3 000€ par m2 dans les arrondissements les plus recherchés. (Ville de Paris, Direction du Logement et de l’Habitat : le Changement d’usage à caractère réel avec compensation, 06/01/2022)

À titre d’exemple, le prix de la compensation pour un local de 164 m2 à proximité de la tour Eiffel s’élève à la somme de 328 000 €. (Cour d’appel de Paris, 15 juin 2023, n°22/19643)

Il existe d’autres solutions légales pour louer son bien sans devoir en demander le changement d’usage pour une location de courte durée et sans devoir procéder à la compensation (le bail-mobilité, la location d’une chambre meublée…).

La possibilité d’interdiction de la location de courte durée par le règlement de copropriété : du point de vue de la copropriété

Même en cas de respect des règles rappelées ci-dessus, le copropriétaire peut se voir interdire la location à courte durée par le règlement de copropriété et/ou en cas de nuisances.  

L’interdiction expresse de la location de courte durée dans le règlement de copropriété

Conformément à la loi du 10 juillet 1965, aucune restriction ne peut être imposée aux droits des copropriétaires sur leurs parties privatives. Toutefois, le règlement de copropriété peut restreindre ces droits en limitant l’usage et la destination de l’immeuble ainsi que les conditions de jouissance des parties privatives afin de garantir la tranquillité et la sécurité au sein de la copropriété. 

En ce sens, le règlement de copropriété peut prévoir une clause d’habitation bourgeoise interdisant aux copropriétaires d’exercer une activité commerciale telle que la location de courte durée touristique, tolérant uniquement les activités professionnelles et libérales.  

La jurisprudence considère que les locations touristiques de courte durée ne correspondent pas à la destination de l’immeuble dont le règlement de copropriété prévoit un usage mixte professionnel-habitation, à l’exclusion de toute activité commerciale. (Cass. Civ. 3ème, 8 mars 2018, n°14-15.864)

En tout état de cause, les copropriétaires peuvent décider à l’unanimité de voter la modification du règlement de copropriété pour autoriser ou interdire les locations de courte durée. 

L’occupation bourgeoise d’un logement implique également que les occupants ne doivent pas causer de troubles au voisinage, comme cela pourrait être le cas dans les locations de courte durée causant des nuisances sonores en raison des allées et venues fréquentes des locataires, leurs valises, ainsi que le libre accès à l’immeuble laissé à des tiers.

L’existence de troubles anormaux de voisinage

Il convient de préciser que même si le règlement de copropriété autorise la location touristique de courte durée, le bailleur peut être contraint d’y mettre un terme si les locataires devaient causer des nuisances aux autres copropriétaires. Dans de tels cas, la jurisprudence se réfère à la notion de troubles anormaux de voisinage pour ordonner au copropriétaire de cesser cette location litigieuse (Cour d’appel de Paris, 11 février 2022, n°21/10676).

En cas de refus de mettre fin à la location irrégulière, les copropriétaires ont la possibilité de saisir le juge des référés afin d’obtenir la condamnation du bailleur à y mettre fin sous astreinte, ainsi que des dommages et intérêts. 

Le Cabinet VPA se tient à votre disposition pour vous conseiller et vous accompagner dans les démarches à suivre pour louer votre bien dans le respect du droit immobilier, des normes en vigueur ou mettre un terme à une location irrégulière.

Article rédigé par Madame Banu Demircioglu, Juriste – Cabinet VPA