Dans le cadre de travaux de construction ou de rénovation, la phase de réception est une étape essentielle méritant une attention particulière pour l’entreprise qui les a réalisés. Elle est généralement suivie par celle de la livraison dans les contrats de promotion immobilière, qu’il convient de distinguer. 

D’une part, la réception est définie à l’article 1792-6 du Code civil comme étant l’acte par lequel le maître d’ouvrage décide ou non d’accepter l’ouvrage à l’issue des travaux qu’il a commandés auprès de l’entreprise, d’autre part, la livraison, intervenant après la réception, formalise la remise physique des clés ou de l’ouvrage au propriétaire, officialisant ainsi sa prise de possession.

La réception implique le maître d’ouvrage et l’entreprise alors que le procès-verbal de livraison est rédigé dans un second temps entre le maître d’ouvrage (généralement promoteur immobilier) et le client final. (Cass. 3e civ 16 févr. 1994, 92-14.342). Il est essentiel pour les entreprises de travaux d’être conseillées sur les enjeux juridiques et économiques de la réception de leurs ouvrages.

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Les caractéristiques de la réception des travaux

Les caractéristiques juridiques de la réception des travaux 

La réception par le maître d’ouvrage. Selon l’article 1792-6 du Code civil, la réception est l’acte par lequel le maître d’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve. Le procès-verbal de réception intervient donc à l’achèvement des travaux. La réception marque l’acceptation par le maître d’ouvrage des travaux réalisés par le constructeur/l’entreprise et leur conformité au cahier des charges. 

L’article 1792-1 définie assez largement le rôle de « constructeur » qui peut être : 

  • Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l’ouvrage par un contrat ;
  • Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire ;
  • Toute personne qui, bien qu’agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l’ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d’un locateur d’ouvrage.

Le caractère contradictoire de la réunion de réception : L’article 1792-6 du Code civil précise que cette réception d’ouvrage, pour produire ses effets, doit être contradictoire c’est-à-dire qu’elle soit réalisée en présence de toutes les parties. Cependant, une différence existe selon qu’on soit l’entreprise de travaux ou le maître d’ouvrage. 

En effet, l’absence de l’entreprise, dès lors qu’elle est régulièrement convoquée à la réunion de réception, suffit à rendre la réunion contradictoire (Cass. civ. 3e, 7 mars 2019, n° 18-12.221) alors que l’absence du maître d’ouvrage, même si régulièrement convoqué, ne rend pas la réunion contradictoire. Celui-ci doit obligatoirement être présent ou au moins représenté. 

Il faut cependant noter que la signature du procès-verbal de réception par les parties n’est pas obligatoire et l’absence de cette signature n’a aucune incidence sur le caractère contradictoire dès lors qu’il n’est pas contestable que l’entreprise et le maître d’ouvrage étaient présents lors de la réunion. C’est en effet ce qu’a considéré la Cour de cassation dans un arrêt du 12 janvier 2011.  Dans cette affaire deux époux, maîtres d’ouvrage, après avoir signés un procès-verbal de réception sans réserve, ont essayé de le remettre en cause en soulevant l’absence de signature de l’entreprise ayant réalisé les travaux, la Cour a décidé que « l’exigence de la contradiction de la réception ne nécessite pas la signature formelle du procès-verbal de réception dès lors que la participation aux opérations de celui qui n’a pas signé ne fait pas de doute » (Cour de cassation, 3e chambre civile, 12 janvier 2011, n° de pourvoi : 09-70.262). 

Les différentes formes de réception des travaux

La réception des travaux peut se faire sous plusieurs formes. Si elle intervient le plus souvent à l’amiable entre l’entreprise et le maître d’ouvrage, en cas de conflit, la réception peut faire intervenir un juge. 

La réception amiable par procès-verbal de réception :

La réception expresse des travaux résulte de la rencontre des parties qui se conclut par la formalisation d’un procès-verbal entre elles, de réception, de non-réception ou de réception avec réserves. En effet, le maître d’ouvrage dispose de la faculté de relever l’ensemble des malfaçons, non-façons, non-conformités ou toutes autres irrégularités apparentes concernant les travaux réalisés par le biais des réserves. Il est donc important pour l’entreprise de négocier avec le maître d’ouvrage afin de limiter le nombre de réserves.

L’intervention du juge dans la réception des travaux se fait dans deux cas : la réception tacite ou la réception judiciaire. 

La réception tacite :

La réception tacite est un procédé reconnu par la jurisprudence qui implique de réceptionner les travaux sans rédaction d’un procès-verbal de réception. Cette forme de réception est généralement sollicitée dans le cadre d’un contentieux où il est demandé au juge de constater qu’une réception est intervenue, pour pouvoir prétendre à l’application des garanties légales. Par exemple, il a été jugé que valait réception tacite la prise de possession effective de l’ouvrage et paiement intégral des travaux par le maître d’ouvrage (Cass. 3ème civ., 18 avril 2019, n°18-13.734). 

La réception judiciaire :

À défaut de réception expresse ou tacite, le maître d’ouvrage ou l’entreprise chargée des travaux peut demander au juge de prononcer la réception avec ou sans réserve des travaux (article 1792-6 alinéa 1 du Code civil).  Pour faire droit à cette demande, le juge va vérifier la conformité des travaux qui doivent être reçus par rapport au cahier des charges et aux règles de l’art (Cass civ 3e 20 avril 2017, n°16-12.790). 

En l’absence de réception des travaux par le maître d’ouvrage l’entreprise peut avoir intérêt à solliciter la réception judiciaire afin de faire débuter et s’achever rapidement les différents délais de garantie auxquelles elle est tenue. 

Les enjeux de l’étape de la réception 

Les enjeux juridiques de la réception pour l’entreprise

La réception comme date d’achèvement des prestations de l’entreprise

Le procès-verbal de réception engendre deux séries d’effets à l’égard de l’entreprise qui a réalisé les travaux :  soit le maître d’ouvrage a accepté les travaux sans réserve et dans ce cas l’entreprise est considérée comme ayant totalement respecté ses engagements ; soit le maître d’ouvrage exprime des réserves dans le procès-verbal et, dans ce cas, l’entreprise n’est pas libérée et sera tenue de lever les réserves ce qui implique, pour l’entreprise, un coût supplémentaire. 

En outre, la réception des travaux est un enjeu financier en ce qu’elle permet de solliciter le paiement du solde du marché. En effet, le paiement du solde est généralement conditionné à la réception sans réserve ou à la levée des réserves émises.

Le transfert de la garde de l’immeuble

La réception des travaux permet de transférer la garde de l’immeuble de l’entreprise vers le maître d’ouvrage. En d’autres termes, au jour de la réception, l’entreprise est déchargée de toute responsabilité en cas d’intrusion, ou de sinistres affectant l’ouvrage tels que le vol, l’incendie, la destruction, etc.

La réception prononcée sans réserve a pour effet de couvrir les désordres apparents, ce qui signifie qu’il ne sera plus possible pour le maître d’ouvrage de solliciter auprès de l’entreprise la réparation des désordres apparents non listés au sein du procès-verbal de réception (Cass civ 3ème du 18 janvier 2024, n°22-22.480).

La réception comme protection juridique et économique de l’entreprise 

La réception des travaux constitue le point de départ des trois garanties légales. 

  • La garantie de parfait achèvement qui permettra de finaliser un ouvrage déjà édifié. Elle permet de lever les réserves formulées lors de la réception (procès-verbal) et de remédier aux désordres apparus au cours de la première année suivant la réception ;
  • La garantie biennale, définie à l’article 1792-3 du Code civil, couvrira les désordres sur les éléments dissociables du corps de l’ouvrage. On entend par là les équipements qui peuvent être enlevés sans endommager la construction. La qualification de ces éléments d’équipement est interprétée de plus en plus strictement par le juge. Par exemple, si des tissus muraux ou des moquettes ont pu un temps être considérés comme des éléments d’équipement relevant de l’article 1792-3 (Cass. Civ 3e, 26 septembre 2007, n° 06-17.216), les décisions les plus récentes écartent au contraire cette qualification (Cass civ 3e, 30 juin 2011, n°09-70.345) ;
  • Enfin, la garantie décennale couvre les dommages qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui la rendent impropre à sa destination. 

La réduction des risques de responsabilité :

En l’absence de procès-verbal de réception, l’entreprise pourrait être responsable de défauts apparues après la réception et/ou qui ne sont pas de son fait. Dans ce cas, les garanties légales ne peuvent jouer et l’entreprise encourt le risque de voir sa responsabilité contractuelle engagée.  

Par ailleurs, à défaut de procès-verbal de réception, l’entreprise devra, à ses frais, prendre en charge le coût des réparations sans pouvoir se prévaloir des garanties des assurances souscrites.

Un outil de preuve en cas de contentieux :

En cas de différend entre l’entreprise ayant réalisé les travaux et le maître d’ouvrage, le procès-verbal de réception est la preuve souveraine qui permettra de limiter les éventuelles contestations du maître d’ouvrage concernant la date de réception, la conformité ou la qualité des travaux, facilitant la défense de l’entreprise en cas de litige. 

Le Cabinet VPA, avocats en droit immobilier, se tient à votre disposition pour vous conseiller et vous accompagner dans le cadre de la réception de vos ouvrages et des éventuelles contestations à ce sujet.

 

Article rédigé par Monsieur Terence ASSEKO AKOMA, Juriste – Cabinet VPA